Le Code de l’Enfant

Une bonne gestion du Droit des Enfants implique de disposer de textes juridiques et de lois pouvant protéger davantage les enfants dans leurs vies quotidiennes. Fort de cette réalité, le Réseau des Structures de Protection des Enfants en Situations Difficiles (ResPESD), dont L’ONG Aide et Progrès est membre depuis 2011, a beaucoup œuvré aux côtés de l’Etat Central.

  • C’est pourquoi a été pris et appliqué le décret N° 2012 – 416 du 06 Novembre 2012 fixant les normes et standards applicables aux Centres de Protection d’Enfants (CAPE ),
  • ainsi que la loi N°201-08 portant sur le Code de l’Enfant en République du Bénin, qui a été délibérée et adoptée par l’Assemblée Nationale en sa séance du 23 Janvier 2015.

Ces deux instruments juridiques sont complémentaires. Le Code de l’Enfant, plus qu’un instrument juridique de protection et de promotion de l’enfance, est un sésame qui permettra désormais aux enfants béninois, quelles que soient leurs origines et leur appartenance, de se sentir épanouis et protégés contre tout danger.  Il est indispensable pour répondre à un problème de protection efficace et durable de l’Enfant dans son ensemble.

Les quatre thématiques cruciales du Code de l’Enfant sont :

– L’ETABLISSEMENT DE L’ACTE DE NAISSANCE

– LA MOBILITE DES ENFANTS

– LE CHATIMENT CORPOREL DES ENFANTS DANS LES ECOLES ET AUTRES CENTRES DE FORMATION OU D’EDUCATION

– LES ABUS SEXUELS ET LA LUTTE CONTRE LE MARIAGE  DES ENFANTS

LE DROIT A L’IDENTITE

Jusqu’à aujourd’hui, on a constaté que de nombreuses naissances ne sont pas déclarées à l’Etat Civil ; les enfants concernés n’ont donc aucune existence juridique. Ces enfants ne parviennent pas à s’inscrire à l’école ou s’y inscrivent mais, une fois en classe de cours moyen deuxième année (CM2), ils n’arrivent pas à constituer les dossiers pour les examens et finissent par abandonner leurs études.

Il peut y avoir plusieurs causes pour qu’un enfant ne dispose pas d’un acte de naissance :

  • la non-déclaration de la naissance à l’officier de l’Etat Civil
  • le non-retrait de la fiche de naissance
  • le non-remplissage ou le mauvais remplissage de la fiche de naissance,
  • la non-transmission de la fiche ou bien sa transmission hors délais. 
  • le non-enregistrement, le mauvais enregistrement (erreurs et fautes), 
  • le mauvais rangement/classement, le non-retrait de l’acte établi
  • la perte, la destruction par incendie, inondation…

Le Code de l’Enfant, pour faciliter la déclaration des naissances, a porté le délai, qui était de 10 jours dans le Code des Personnes et de la Famille, à 21 jours. Ce n’est pas, pour les parents ou tout déclarant, une incitation à attendre pour la déclaration. Celle-ci doit être faite dès que la fiche de naissance est remise.

Les déclarations peuvent émaner du père ou de la mère, d’un ascendant ou d’un proche parent, du médecin, de la sage-femme, de la matrone, du chef de village ou de quartier de ville, ou de toute autre personne ayant assisté à la naissance. Le Procureur de la République territorialement compétent peut à tout moment et en dehors des délais prévus, faire la déclaration d’une naissance dont il aura eu connaissance et qui n’aurait pas été constatée à l’Etat Civil (cas d’un enfant retrouvé).

Toute personne n’ayant pas accompli son devoir dans le cadre de la déclaration des naissances, par négligence, par intention de nuire ou oubli est punie. Selon le cas et l’auteur de l’infraction, le code prévoit des peines d’amendes, de prison, de suspension de poste, de rétention de salaire…

Il est important que chaque enfant ait son acte de naissance pour sa reconnaissance juridique, sa scolarisation, son développement et le développement de son pays.

LA MOBILITE DES ENFANTS

La mobilité des enfants désigne les déplacements d’enfants entre différents espaces géographiques. La traite, les migrations, le placement, l’aventure, la situation de réfugiés ou de déplacés sont des formes de mobilité des enfants. Pour certains enfants, comme pour leurs familles, la mobilité est appréhendée comme une source d’opportunités : opportunité de scolarisation et de formation, de travail et d’épanouissement, de liberté et d’autonomisation.

Les risques liés à la mobilité des enfants sont très nombreux :

  • déscolarisation,
  • dépeuplement,
  • soumission à des travaux dangereux, à la maltraitance, à divers abus et violences 
  • endoctrinement, enrôlement dans les groupes de malfaiteurs ou incontrôlés
  • disparition, noyade, assassinat avec extraction d’organes…

L’enfant doit être suivi dans son milieu habituel ou de provenance, lors de son déplacement, et jusqu’à sa destination, pour sa propre sécurité et son intérêt. Pour les déplacements d’enfants, la loi prévoit des normes qu’il faut suivre, comme par exemple l’obtention d’une autorisation de sortie.

Tous ceux qui font sortir ou se déplacer des enfants sans autorisation des autorités compétentes ou les exploitent sont passibles de sanctions, conformément aux textes en vigueur.

LE CHATIMENT CORPOREL DANS L’EDUCATION DES ENFANTS

La Constitution du Bénin, les conventions internationales et la Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant prescrivent pour tout individu et pour l’enfant le droit à la vie, à la liberté, à la sécurité et à l’intégralité de sa personne, et interdisent tous tortures, sévices ou traitements cruels, inhumains, ou dégradants.

Le Code de l’Enfant interdit le châtiment corporel sur l’enfant dans toutes les sphères de la vie : à la maison, à l’école, dans les lieux de formation, Centre d’Accueil et de Protection d’Enfants (CAPE)…

Le châtiment corporel et différents types de violence sont encore malheureusement utilisés dans l’éducation de l’enfant, que ce soit dans la vie familiale ou scolaire. Souvent les adultes qui frappent les enfants pensent bien faire ; mais ils leur font du mal sur les plans physique, psychologique, et peuvent être responsables de blessures, voire de mort subite. Les auteurs de châtiments corporels s’exposent à des sanctions pénales, pouvant aller jusqu’à la réclusion à perpétuité, suivant la gravité des conséquences.

Des punitions sont autorisées, pouvant varier selon le contexte de l’enfant et de l’éducateur, et doivent être appliquées avec justice. On peut citer entre autres : la réprimande, la privation partielle de récréation, la retenue après la classe sous surveillance de l’enseignant, l’exclusion temporaire, la privation d’un loisir préféré, le retrait du groupe de perturbateurs, la demande d’excuses, la réparation du tort causé, l’information des parents, la remise de l’enfant à ses parents…

Les éléments suivants encouragent à ne pas frapper l’enfant :

C’est un mauvais exemple 

  • Frapper les enfants leur apprend à frapper. Il est de la responsabilité des parents d’être un exemple d’empathie et de sagesse. 

C’est inefficace 

  • Le châtiment empêche un enfant d’apprendre à résoudre un conflit d’une manière efficace et sensible. Un enfant frappé est concentré sur son sentiment de colère et ses fantasmes de revanche.
  • Les châtiments interfèrent avec le lien noué entre le parent et l’enfant, car il n’est pas dans la nature humaine de se sentir plein d’amour envers quelqu’un qui nous fait du mal. Le châtiment, même lorsqu’il semble fonctionner, ne peut produire qu’un comportement bon en apparence, mais celui-ci est basé sur la peur. Il permettra d’obtenir ce « bon comportement » les premières années, mais ce sera toujours au prix fort, payé par les parents et par la société tout entière. Car lorsque l’enfant atteindra l’adolescence, puis à l’âge adulte, il se sentira alors assez fort pour exprimer sa rage et châtier aussi les plus faibles.
  • Le châtiment corporel transmet le message à la fois dangereux et injuste que « la force fait loi », et qu’il est acceptable de frapper quelqu’un, tant qu’il est plus petit et plus faible que soi. L’enfant conclut alors qu’il est possible de maltraiter les enfants plus jeunes ou plus petits. 

C’est injuste 

  • Il est surement mauvais et injuste de punir un enfant parce qu’il répond d’une manière naturelle à la sensation d’un besoin important qui est négligé. Pour cette raison, la punition n’est pas seulement inefficace à long terme, elle est également injuste.

C’est dangereux 

  • Ne connaissant pas de mesures alternatives, lorsque le châtiment ne permet pas/plus d’obtenir les résultats espérés, il y a un risque d’escalade vers des châtiments de plus en plus fréquents et des actions dangereuses à l’encontre de l’enfant.
  • Même une fessée relativement modérée peut être physiquement dangereuse. Certains enfants sont même décédés après des coups modérés, suite à des complications médicales qui n’avaient pas été diagnostiquées.
  • La fessée sur les fesses, zone érogène pour l’enfant, peut créer dans l’esprit de celui-ci une association entre la douleur et le plaisir sexuel, et lui créer des difficultés à l’âge adulte.

Une éducation douce, soutenue par une forte fondation d’amour et de respect, est la seule véritable manière d’obtenir un comportement recommandable, basé sur de puissantes valeurs personnelles, plutôt qu’un « bon » comportement superficiel, basé uniquement sur la peur.

 

LES ABUS SEXUELS ET LA LUTTE CONTRE LE MARIAGE DES ENFANTS 

L’on parle de mariage d’enfants lorsque dans une union conjugale, il y au moins un enfant (âgé de moins de 18 ans) fille ou garçon. Les filles sont majoritairement les plus grandes victimes : 3 filles sur 10 âgées de moins de 18 ans sont victimes du mariage des enfants aux Bénin. La fille victime est quelquefois informée ; souvent menacée, enlevée, séquestrée, violée, engrossée sans consentement. Les facteurs qui favorisent cet état de choses sont : la pauvreté, la perpétuation de certaines coutumes et les considérations religieuses désuètes, l’ignorance des lois et des conséquences du mariage des filles, le manque d’ambition et de projection des parents pour leurs filles.

Les conséquences sont nombreuses. Il s’agit de :

  • souffrances physique et psychologique,
  • maladies, grossesses et maternités précoces, difficultés d’accouchement, perforation, fistules obstétricales,
  • aventure dans la rue,
  • retrait de l’école et de l’apprentissage,
  • rejet, incapacité d’entretenir et d’éduquer leurs enfants, paupérisation de la famille …

Le Code de l’Enfant de la République du Benin interdit le mariage des enfants et sanctionne les auteurs : un emprisonnement de 3 à 10 ans et une amende de 100.000 à 5OO.OOOF CFA. Par ailleurs, les articles relatifs aux grossesses chez la fille mineure, aux viols d’enfants et aux abus sexuels sont aussi applicables (articles 345, 347…) selon le cas.

L’ABUS SEXUEL est l’acte lors duquel un enfant est utilisé à des fins sexuelles (avec ou sans consentement). L’abus sexuel est souvent perpétré par une personne (adulte ou un enfant plus âgé) en qui l’enfant a confiance ou qui est en position de force, d’autorité et de contrôle sur lui. Les différentes sortes d’abus sexuels sont : l’enlèvement, la séquestration, le viol ou tentative de viol, le harcèlement sexuel, l’inceste, l’exploitation sexuelle, le mariage précoce / forcé, les propos, attouchements, gestes et autres actes à connotation sexuelle.

Il y a eu des cas d’abus sexuels d’enfants dans les écoles, dans les lieux d’apprentissage, dans les familles, dans les clubs des jeunes, dans les centres d’accueil d’enfants, au marché, dans la rue, les couvents et autres lieux de cultes.  

Les abus sexuels commis sur des enfants en général, et sur des filles en particulier, sont des actes criminels qui bafouent les droits et la dignité de l’enfant et ne peuvent être justifiés sous aucun prétexte. Le Code de l’Enfant et d’autres textes réglementaires interdisent ces actes et répriment leurs auteurs. Les peines peuvent aller jusqu’à 5.000.000 F CFA d’amende et à la réclusion à perpétuité, selon la qualification et la gravité de l’acte commis.

Les avortements provoqués, les grossesses infantiles sont des conséquences qui découlent directement d’abus sexuels. Au Bénin au cours de l’année scolaire 2016 – 2017, la Direction de l’Enseignement Secondaire et Général a pu dénombrer près de 3000 grossesses dans les lycées et collèges (2763 cas avec précision).  

Les conséquences des abus sexuels sur les enfants sont énormes et dramatiques :

  • la honte, le sentiment d’être différent des autres, la culpabilité,
  • l’isolement social, la peur, l’incapacité de faire confiance aux autres,
  • le handicap physique et ou mental, la dépression,
  • le stress post-traumatique,
  • la frigidité, le mépris de l’acte sexuel, la mort….

La Charte de Bonnes Pratiques (CBP) est une disposition qui a fait ses preuves et qui se fonde sur l’engagement réciproque des acteurs de l’école (les enseignants, les élèves, les parents d’élèves, les vendeuses, le personnel de service et les responsables de l’administration) et sur divers supports de communication et de suivi. La Charte de Bonnes Pratiques (CBP) a été institutionnalisée par arrêtés au niveau des enseignements secondaires, de l’enseignement primaire et dans les écoles normales d’instituteurs. Elle facilite le dialogue sur les abus sexuels et les dispositions pour les éviter.

LES ACTIVITES DE VULGARISATION DU CODE DE L’ENFANT DANS LA COMMUNE DE OUIDAH

L’ONG Aide et Progrès a été retenue après sélection par le Réseau Des Structures de Protection des Enfants en Situation Difficile (ReSPESD) pour conduire les activités de vulgarisation du Code de l’Enfant dans la commune de Ouidah. Cinq écoles primaires ont été choisies dans quatre différents arrondissements :

Arrondissement de PAHOU = EPP JOIE & VIE et EPP AHOZON/A

Arrondissement de AVLEKETE = EPP AVLEKETE

Arrondissement de SAVI = EPP DEKOUENOU

Arrondissement de LEBOU = EPP LEBOU.

Au total, 462 écoliers et écolières des classes du CM1 et CM2 ont été formés et sensibilisés au contenu des quatre thématiques cruciales du Code de l’Enfant. Dix (10) Enseignants, cinq (05) Directeurs d’école et Dix (10) membres des bureaux d’Association des Parents d’Elèves ont été formés par l’équipe de l’ONG Aide et Progrès sur ces quatre thématiques.

Diverses activités ont été menées pour la vulgarisation et la diffusion du Code de l’Enfant dans la commune de Ouidah : formations, sensibilisations, causeries débats, émissions radio et rencontres d’autorités départementales en charge de l’éducation maternelle et primaire, le tout reparti sur deux semaines.

Plaidoyer participatif : les écoliers du Village d’Enfants SOS d’Abomey-Calavi et leurs homologues du projet scolaire Joie et Vie dans la commune de Ouidah se sont déplacés dans la commune d’Allada, le Mardi 26 Décembre 2017, au nouveau siège de la Direction Départementale des Enseignements Maternel et Primaire du département de l’Atlantique. Ils ont remis un exemplaire du Code de l’Enfant au Directeur Départemental. Le représentant des enfants a lu leur correspondance de plaidoyer, demandant au DEDEMP de prendre des dispositions adéquates pour que le respect du Droit des Enfants soit une réalité au Bénin, et en particulier dans le département de l’Atlantique. L’apprentissage sans chicotte ni violence est le meilleur système d’éducation, qu’on doit promouvoir pour assurer une bonne formation de la génération future qui assumera un jour diverses responsabilités. Le Directeur Départemental des Enseignements Maternel et Primaire du département de l’Atlantique a promis faire de son mieux pour que le châtiment corporel et les violences faites aux enfants en milieu scolaire soient conjugués au passé dans son département.